Veiller sur elle de Jean-Baptiste Andrea : prix Goncourt 2023

En visitant Florence au 19e siècle, l'écrivain français Stendhal relate une expérience extraordinaire qu'il a vécue au berceau de la Renaissance. Par Reslane Lounici

À sa sortie de la basilique Santa Croce, il raconte : “J’étais arrivé à ce point d’émotion où se rencontrent les sensations célestes données par les Beaux-Arts et les sentiments passionnés. En sortant de Santa Croce, j’avais un battement de cœur, la vie était épuisée chez moi, je marchais avec la crainte de tomber.”

Mimo, ou Michelangelo Vitaliani

Plus d’un siècle après cette expérience inédite, le diagnostic est posé par la psychiatre italienne Graziella Magherini. Le syndrome de Stendhal, également connu sous le nom de syndrome de Florence, est un état de conscience dans lequel le sujet développe une admiration sans bornes pour l’œuvre d’art, et une impression de ‘sublime’ finit par le submerger émotionnellement.

C’est ce qui arrive à toutes les personnes qui découvrent pour la première fois la sculpture de Mimo dans le roman de Jean Baptiste Andrea « Veiller sur elle ». Mimo, ou Michelangelo Vitaliani (la référence à Michel-Ange étant totalement intentionnelle), rencontre Viola Orsini, la fille d’une des plus riches familles de Pietra d’Alba où il est envoyé par sa mère pour travailler dans l’atelier d’un oncle dont il n’a jamais entendu parler. Ces deux-là n’étaient jamais destinés à se rencontrer, mais le sort en a décidé autrement et leur rencontre basculera la vie de l’une et de l’autre dans un tourbillon d’excès, de passion et de savoir.

Une vision façonnée par plusieurs évènements

Nés tous les deux le même jour en 1904, ils sont jumeaux cosmiques, et ce lien les fera traverser près d’un siècle où l’histoire de l’art côtoie l’histoire de l’Italie. La première guerre mondiale puis la seconde, la montée du fascisme et son effondrement, l’art et les sciences pour lesquels Viola voue une ardente passion, façonneront la vision de Mimo et le pousseront à perfectionner l’art de la sculpture jusqu’à toucher au divin.

La plume poétique de Jean-Baptiste Andrea plonge le lecteur dans un récit d’amitié profondément humain où les choix des uns impactent le destin de tous. Si nous sommes parfois tentés de croire que le monde est sombre, cette histoire nous rappelle la force de la beauté qui, en toutes circonstances, nous fera toujours voguer vers des horizons plus accueillants.