72 heures en transparence : une aventure improbable

La fée Flora m’a rendu visite dans mon sommeil, la nuit dernière. Elle a agité son doigt verni au-dessus de ma tête et a dit : ‘Ta vie est plate comme une limande ces derniers temps. Je t’offre 72 heures en transparence. Profites-en !’ Par Celia Ouabri

Je croyais avoir rêvé, mais le matin, devant mon miroir, je n’existais plus. Au lieu de paniquer, j’ai sauté au plafond. Pas une seconde à perdre.

Direction l’aéroport

Le coucou blanc embarque ses derniers passagers. Destination : Paris. Dans le long couloir, je circule. Pas l’ombre d’une place libre en classe économique, alors je m’installe à l’avant de l’avion en première classe.

Je sirote un Mojito, croque dans un avocado toast et caresse du regard le torse en tablette de chocolat du steward. À l’aéroport Charles de Gaulle, je passe comme une lettre à la poste. Je ricane sous cape en voyant les interminables files qui s’étirent devant la PAF. Pfff !

Destination L. A.

Je fends la foule. Le panneau d’affichage annonce que le vol vers Los Angeles est imminent. J’allonge le pas en slalomant entre les voyageurs pressés. Je m’engouffre in extremis dans la carlingue du Boeing 777 d’American Airlines.

L’avion est plein. Je me contente d’un siège rabattable réservé au personnel navigant. Harassée par cette matinée sportive, je pique du nez. Une voix suave me réveille : « Welcome to Los Angeles International Airport ».

Un périple excitant

Je suis transportée d’excitation. Je me dirige rapidement vers la sortie et saute dans un taxi. Sur le siège arrière, une blonde pulpeuse est assise à côté de moi. Elle a le cou et les doigts sertis de diamants. De grosses lunettes noires cachent son regard. J’aurais juré que c’est Madonna, mais je n’en suis pas sûre. La dame fume une cigarette et m’envoie des volutes de fumée dans la figure. Je tousse, mais aucun son ne sort de ma gorge. Merci à la fée Flora de m’avoir donné cette option !

Bientôt, des demeures luxueuses déroulent leurs jardins gazonnés sous mes yeux ébahis. Le quartier chic de Beverly Hills m’ouvre ses bras. Je ne pensais pas voir cela un jour en dehors des films et des feuilletons américains. Je profite d’un feu rouge pour sauter du taxi. Je tombe sur un groupe de touristes asiatiques. À coup de ‘ha’ et de ‘ho’, ils mitraillent les splendides villas avec leurs appareils photos. Le guide pointe une maison : ‘Celle-ci appartient à George Clooney !’

L’information percute mes tympans. Ni une ni deux, je fonce vers la demeure. J’enjambe la clôture et me retrouve le nez dans le bosquet de pétunias. Le Doberman roupille tranquillement sous un saule pleureur. Ni vu ni connu, je m’embrouille. J’ai le temps d’apercevoir la piscine et les chaises longues du jardin. La porte de la maison est entrouverte.

Un réveil difficile

Mon cœur bat la chamade. Je franchis le seuil et me voici dans un espace immense, lumineux et épuré. Et là, mon cœur manque un battement… ‘What Else’ est là, allongé sur le canapé du salon. Un grand écran plasma diffuse ‘Titanic’. Mon acteur préféré est là, à portée de main ! Je me pince, tellement tout cela semble irréel. J’avance vers lui et tends la main pour le toucher. Mes doigts glissent sur son bras.

Soudain, il écarquille les yeux : “Who are you? How did you get here?” (Qui êtes-vous et comment êtes-vous entrée ici ?) Mon sang se glace. Je suis livide. Flora la fée m’avait pourtant dit 72 heures. Ai-je mal entendu ? Le charme est rompu ! Je ne suis plus invisible. Le ciel me tombe sur la tête. J’entends Georges appeler la police. Je suis dans de beaux draps. Ma galère ne fait que commencer.