Yennayer en Algérie : à la croisée de l’histoire, des légendes et des traditions berbères

Dans les sommets des montagnes berbères, là où résonnent des récits ancestraux qui bercent encore l’âme des Hommes libres, les Amazigh, est célébré Yennayer, une fête qui a su résister aux travers du temps. Par Meriem Kamli

Bien plus qu’une simple transition d’une année à une autre, Yennayer représente la célébration de l’histoire de tout un peuple qui a su préserver ce lien unique avec sa culture, son identité, mais aussi une symphonie de légendes envoûtantes et de coutumes tissées dans les traditions berbères.

Yennayer : un témoin de l’Histoire Amazigh 

Lorsque l’on fouille dans l’histoire du peuple Amazigh, Yennayer émerge comme un joyau historique, reflétant la grandeur et la civilisation millénaire de ces derniers. Cette coutume a survécu à travers les siècles en tant que témoin des changements qui ont marqué l’histoire des Imazighen, devenant ainsi un symbole de résilience culturelle.

Selon de nombreuses sources, Yennayer correspond au premier jour de l’an du calendrier agraire qu’utilisaient les habitants natifs d’Afrique du Nord. Ces derniers le célèbrent le 12 janvier de chaque année.

D’un point de vue historique, Yennayer retrouve ses traces dans un évènement majeur qui a marqué les amazigh, celui de la victoire du roi Sheshonq Iᵉʳ sur le pharaon d’Egypte en 950 avant Jésus-Christ. Le jour de son accession au trône, le roi a décrété que ce jour serait célébré comme le Nouvel An Amazigh. La légende raconte qu’il était un roi juste et équitable. Il a régné pendant 21 ans et a apporté la prospérité à son peuple.

Mythes et légendes autour d’une célébration enchantée 

À l’image des conteurs qui dispersent leurs histoires sur leurs chemins, Yennayer s’enrichit de mythes et de légendes qui prennent vie d’une région à l’autre. Chaque communauté apporte sa propre version de ces récits enchantés, tissant une épopée fantastique autour de cette célébration ancestrale.

Parmi les histoires les plus racontées en cette période, on retrouve :

  • l’histoire de Yennayer et Furar (plus connue sous le nom de la vieille femme et sa chèvre) : on raconte qu’une vielle femme sortit avec sa chèvre le dernier jour du mois de Yennayer (janvier) et se moqua de lui. Yennayer, blessé par tant d’ingratitude, se dirigea vers son frère Furar (février) à qui il demanda un jour de plus pour punir la vieille femme. C’est ainsi que le mois de février devint le mois le plus court de l’année ;
  • les esprits des montagnes : qui, selon les croyances berbères, se manifestent pendant Yennayer. Ces esprits sont bienveillants et considérés comme les gardiens des terres et des traditions. On dit que pendant la nuit du Nouvel An, ils parcourent les villages pour veiller sur les villageois et leur apporter des bénédictions pour l’année à venir ;
  • laâdjouza (vielle femme) : on raconte qu’une vielle femme apparaissait au milieu de la nuit pour enlever les bonbons des enfants qui ne sont pas restés sages au cours de l’année.

Les traditions et coutumes de Yennayer 

Qui dit Yennayer, dit grande célébration et par conséquent, rassemblement de la famille autour d’une grande table. En cette période, toute l’Afrique du Nord se pare de couleurs vives et de musiques festives pour accueillir la nouvelle année. C’est un moment où les traditions reprennent vie et unissent les communautés au-delà des frontières.

Même si les traditions et coutumes de la célébration de Yennayer varient d’une région à une autre, celles-ci conservent toutes une essence commune, reflétant l’identité et la culture Amazigh.

Des festins somptueux 

En effet, rien de tel que des repas généreux et copieux pour réunir les membres de la famille. Dans cette occasion, les plats traditionnels sont privilégiés dont le fameux couscous aux sept légumes ou dans d’autres régions la chakhchoukha ou rechta. Pour les desserts, on retrouve la tamina, les beignets sucrés, une variété de fruits secs et des friandises qu’on distribue aux enfants.

Les expositions artisanales 

On retrouve lors de la période des festivités des expositions un peu partout, et ce, dans le but de présenter la culture et l’identité Amazigh, mais aussi afin de la familiariser avec les nouvelles générations.

Les visites familiales et les échanges de vœux 

Yennayer est une occasion de tisser des liens familiaux solides. Les familles se rendent visite, échangent des vœux de bonne année et de bonheur et partagent des moments de convivialité.

Les célébrations dans des places publiques 

Les gens préparent des repas et organisent des distributions, comme la Twiza, pour aider les plus démunis. Ils participent également à des événements culturels comme les chants et les danses.

L’allumage d’un feu symbolique 

Dans de nombreuses régions berbères, l’allumage d’un feu est un rituel important lors des célébrations de Yennayer. Ceci symbolise le renouveau et la purification, afin que la nouvelle année soit porteuse d’espoir et de prospérité.

Le port de vêtements neufs 

La tradition veut que les gens portent de nouveaux vêtements lors des festivités de Yennayer. Ces vêtements représentent la fraîcheur d’un nouveau départ, la volonté de laisser derrière soi les difficultés du passé et d’embrasser l’avenir avec optimisme.

Décorations et symboles

Les maisons et les espaces publics sont souvent décorés de manière festive. Des symboles tels que des tapis colorés, des lanternes, et des motifs traditionnels berbères peuvent être utilisés pour créer une atmosphère joyeuse et symbolique. Ces coutumes et traditions symbolisent l’abondance, la prospérité et le partage, qui sont des valeurs fondamentales de la culture Amazigh. C’est à travers ces dernières que se renforce le sentiment d’appartenance et de communauté.

Bien plus qu’un simple marqueur de temps, Yennayer est une symphonie où les Amazigh honorent leur passé et le relient à un avenir vibrant. Les coutumes festives, les histoires enchantées et les cérémonies partagées célèbrent alors un écho indomptable et intemporel de l’âme Amazigh.