Alzheimer en Algérie : une urgence sanitaire silencieuse

Plus de 200 000 Algériens souffrent aujourd’hui de la maladie d’Alzheimer, un chiffre qui a doublé en une décennie et qui ne cesse d’inquiéter les spécialistes.

Cette pathologie neurodégénérative, encore trop méconnue, bouleverse non seulement la vie des patients mais aussi celle de leurs familles, souvent livrées à elles-mêmes dans la prise en charge.

À l’échelle mondiale, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), près de 10 millions de nouveaux cas de démence — dont Alzheimer représente la forme la plus fréquente — sont recensés chaque année. En Algérie, les chiffres sont alarmants : faute de structures adaptées et de suivi spécialisé, de nombreux malades restent en marge des soins.

Qu’est-ce que la maladie d’Alzheimer ?

Selon le Dr Yassine Yahi, neurologue, « Alzheimer est une forme de démence sénile qui affecte les fonctions intellectuelles, sociales et relationnelles du patient, entraînant une perte progressive de son autonomie ».

Concrètement, il s’agit d’une dégénérescence des cellules cérébrales, provoquant des troubles de la mémoire, du langage, de la pensée logique et même de la perception sensorielle. Contrairement à une idée reçue, ce n’est pas une étape normale du vieillissement, mais une véritable pathologie dont les risques augmentent avec l’âge :

  • Environ 5 % des personnes âgées de 65 à 74 ans sont touchées.
  • Ce chiffre grimpe à près de 50 % après 85 ans.

Les causes et les mécanismes de la maladie

Alzheimer ne résulte pas d’un seul facteur, mais d’une combinaison complexe entre génétique, mode de vie et environnement.

Les chercheurs ont identifié deux phénomènes clés responsables de la dégénérescence des neurones :

  • Les plaques amyloïdes : accumulation anormale d’une protéine (bêta-amyloïde) qui perturbe la communication entre les neurones.
  • Les dégénérescences neurofibrillaires : anomalies d’une autre protéine, la tau, qui s’accumule à l’intérieur des cellules nerveuses, entraînant leur mort progressive.

Comment reconnaître Alzheimer ?

Les premiers signes sont souvent discrets, mais s’aggravent avec le temps. Parmi les symptômes les plus fréquents :

  • Pertes de mémoire récurrentes (répétition de phrases, oubli de rendez-vous, objets égarés).
  • Difficultés à accomplir des tâches simples de la vie quotidienne.
  • Problèmes de langage (incapacité à trouver les mots justes).
  • Désorientation dans le temps et l’espace.
  • Changements d’humeur et de personnalité (anxiété, méfiance, agressivité).

Ces troubles évoluent progressivement vers une dépendance totale du patient, nécessitant un accompagnement permanent.

Un défi pour les familles et le système de santé

En Algérie, la prise en charge reste un véritable parcours du combattant. Le manque de structures spécialisées et de centres de soins adaptés pousse les familles à endosser seules la lourde responsabilité du suivi au quotidien.

Le coût des médicaments, l’absence de programmes nationaux de sensibilisation et la rareté des services de soutien psychologique aggravent encore la situation.

Face à cette réalité, les spécialistes plaident pour :

  • La création de centres dédiés à la prise en charge des malades.
  • Une meilleure formation du personnel médical.
  • Des campagnes nationales de sensibilisation et de dépistage précoce.

Vivre avec Alzheimer : un combat collectif

Au-delà des chiffres, Alzheimer reste une épreuve humaine. Derrière chaque malade, une famille se bat quotidiennement pour offrir dignité, amour et sécurité.

Comme le rappelle le Dr Yahi : « Si nous n’investissons pas dès aujourd’hui dans la prévention et la prise en charge, Alzheimer deviendra demain une véritable bombe sanitaire en Algérie ».

Il est donc urgent que les pouvoirs publics, les associations et les professionnels de santé unissent leurs efforts pour répondre à ce défi grandissant.