Le harcèlement de rue n’est pas une nouveauté en Algérie. C’est un fléau qui touche toutes les femmes, sans distinction d’âge ou d’apparence : jeunes filles, femmes voilées ou non, mères de famille, femmes enceintes… aucune n’est épargnée.
Dans les rues, les bus, près des lycées ou dans les transports publics, les agressions verbales, les gestes déplacés et les regards insistants sont devenus le quotidien de milliers d’Algériennes. Mais cette fois-ci, la réaction est différente. Face à ce phénomène devenu insupportable, les femmes ont décidé de riposter, et c’est sur les réseaux sociaux que la lutte s’organise.
#لا_للتحرش_في_الجزائر »
Sur TikTok et Facebook, un nouveau hashtag fait fureur : « #لا_للتحرش_في_الجزائر » (Non au harcèlement en Algérie). L’initiative est simple mais puissante : filmer les agresseurs en pleine action et diffuser les vidéos massivement.
Ces derniers jours, des centaines de séquences ont été publiées, montrant des hommes, jeunes ou plus âgés, interpellant, suivant ou harcelant des femmes dans les espaces publics. Filmés à leur insu, ils se retrouvent exposés devant des milliers d’internautes.
Cette riposte numérique, inédite par son ampleur, dérange. Elle choque une partie de la société, surtout dans les milieux conservateurs où la question du harcèlement est souvent minimisée, voire justifiée. Sur les réseaux, les commentaires sexistes pullulent : « Couvre-toi », « Mets un voile », « La place de la femme est à la maison ». Autant de réflexions qui révèlent une mentalité profondément ancrée, où la responsabilité du harcèlement est encore rejetée sur les victimes.
Une initiative qui divise
Mais cette initiative divise aussi sur un autre plan. Certains dénoncent une atteinte à la vie privée, arguant qu’il est illégal de filmer quelqu’un sans son consentement.
La question fait débat. Cependant, d’un point de vue juridique, la loi algérienne est claire : l’article 333 bis du Code pénal punit le harcèlement de rue d’une peine de 2 à 6 mois de prison, assortie d’une amende de 20.000 à 100.000 dinars. Si la victime est mineure (moins de 16 ans), les peines sont doublées. Des juristes rappellent qu’il est tout à fait possible de déposer plainte, en s’appuyant sur ces vidéos comme preuves.
Au-delà des frontières algériennes, le mouvement trouve un écho chez nos voisins maghrébins où le harcèlement de rue est tout aussi répandu. Des internautes saluent l’initiative, la considérant comme une lutte globale : « Il ne s’agit pas que des femmes algériennes, mais de toutes les femmes dans le monde », écrivent-ils.
La question qui se pose désormais est celle de l’impact à long terme : ce mouvement numérique aura-t-il la force de changer les mentalités et d’imposer des mesures concrètes face à un phénomène social aussi enraciné ? Rien n’est encore sûr. Mais une chose est certaine : l’indignation est massive, et le cri de ces femmes force aujourd’hui les médias, l’opinion publique et même certains responsables à regarder la réalité en face.
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