Ils manœuvrent parfois sans retenue pour abuser de leurs collaboratrices, profitant de leur statut de dirigeants d’entreprises privées ou de responsables dans le secteur public, pensant ainsi pouvoir exercer un contrôle sur les individus à leur guise.
Lorsqu’on se croit tout permis
Pour ces individus, à l’instar de Dominique Strass-Kann, aux intentions libidineuses, il leur suffit de claquer des doigts pour s’octroyer un peu de bon temps au travail, se permettant d’agir sans scrupules. Les cibles privilégiées sont les nouvelles recrues, qu’elles soient célibataires, mariées ou divorcées.
Les prédateurs sexuels, dépourvus de toute retenue, prennent pour cible leurs employées sans distinction, ne tenant pas compte des détails. Le processus commence souvent par des compliments déplacés sur l’apparence physique, des gestes audacieux tels que des tapotements suggestifs sur l’épaule ou des caresses osées sur la nuque. Ces harceleurs n’hésitent pas à franchir les limites en mettant la main de manière intrusive dans le « balcon » de leurs employées.
« Motus et bouche cousue »
Pour parvenir à leurs objectifs, ces individus font miroiter des avancements et des promotions à leurs victimes. Face à ces prédateurs, de nombreuses femmes qui n’ont rien demandé souffrent en silence, préférant reléguer ce sombre dossier dans le fichier « secret défense » au plus profond de leur esprit. « Motus et bouche cousue » devient leur mantra.
La peur des représailles de la part du patron, l’appréhension de la vindicte éventuelle de leur entourage, la crainte de se retrouver au chômage, et le sentiment de honte sont autant de raisons qui expliquent leur silence, profond et varié.
Résister à leur agresseur signifie souvent se soumettre à un harcèlement moral accru, à une surcharge de travail, ainsi qu’à des menaces de licenciement. Pourtant, malgré ces pressions, entre perdre son emploi et sauvegarder son honneur, le choix devrait, en principe, être évident. Bienvenue dans ce monde impitoyable.
Au plaisir de ne plus vous revoir !
Parce qu’elles ont besoin d’un salaire, certaines femmes endurent en silence. Dès qu’elles sont convoquées dans le bureau du patron, la crainte s’empare d’elles. Elles sont assaillies de compliments excessifs, d’insinuations sous-jacentes, de mains baladeuses, et de clins d’œil suggestifs. Elles subissent les avances de leur patron sans pouvoir se défendre. Deux victimes de harcèlement sexuel ont accepté de rompre le silence pour nous faire part de leur calvaire.
Dihiya, âgée de 29 ans, a occupé le poste de chef de projet pendant un an au sein d’une entreprise de communication. Victime de harcèlement de la part de son patron, elle a finalement décidé de quitter son poste. « Quand j’ai commencé à prendre des tranquillisants la nuit pour trouver le sommeil, j’ai compris qu’il était temps de mettre un terme à cette situation », raconte-t-elle.
« Dès le début, mon employeur a commencé à me poser des questions indiscrètes, telles que ‘as-tu quelqu’un dans ta vie’, ‘es-tu libre de sortir la nuit’, ‘aimes-tu porter des strings’, etc. J’ai évité ces questions en pensant que cela passerait parfois en esquivant des épreuves orales intimes.
« Cependant, le jour où il m’a agressée ouvertement dans les couloirs, a réajusté une mèche de mes cheveux en me détaillant de la tête aux pieds, tout en me touchant avec sa main baladeuse, j’ai senti mon poing se serrer et frapper directement son nez. Je suis partie immédiatement sans demander mon compte. Certes, j’étais la seule à subvenir aux besoins de ma famille et j’avais désespérément besoin de ce salaire, mais il y a des limites. Heureusement, j’ai depuis trouvé bien mieux et je mène une vie professionnelle épanouissante. »
Ivre de toi !
Souad a vécu presque le même calvaire, mais elle y a mis fin au bout de quelques jours de travail seulement. « Passé la première semaine de collaboration, mon ex-boss m’avait demandé de l’accompagner pour une mission de travail à Oran. Il faut dire qu’avant de faire connaissance dans l’avion, on s’était très peu croisé au siège de l’entreprise.
Planquée que j’étais à éplucher les dossiers, je n’ai pas eu l’occasion de trop discuter avec mes différents collaborateurs. Une fois sur place, bien installée à l’hôtel et après un léger repas du soir et une petite préparation du programme à accomplir le lendemain matin, j’ai pris congé de mon responsable pour rejoindre ma chambre.
Très tard, dans la nuit, j’ai entendu taper du poing contre ma porte. J’ai naturellement couru pour ouvrir et qui vois-je ? Mon patron, l’œil vitreux, complètement ivre et qui ânonnait en se jetant sur moi : « Souad, Souad… je suis complètement fou de toi ! ».
Passée la seconde de stupéfaction, je me suis ressaisie et je l’ai repoussé de toutes mes forces. Il est reparti en titubant comme un poivrot. Le lendemain, j’ai fui comme une voleuse. Un taxi m’a ramenée illico presto sur Alger et plus jamais je n’ai remis les pieds dans cette boîte. J’ai préféré garder le silence, car je sais que si mes frères venaient à apprendre comment cette personne s’est comportée envers moi, ça pourrait dégénérer en bataille. »
Le travail, c’est la santé ?
Les dirigeants d’entreprise aux pulsions déplacées ne semblent guère se soucier des limites. Le harcèlement sexuel persiste, même envers les femmes mariées, créant un environnement effrayant pour ces mères de famille. Nabila, une assistante de direction mariée de 34 ans, a enduré des humiliations constantes de la part d’un patron sans scrupules. Malgré sa situation délicate, elle a gardé le silence par peur des conséquences.
Son directeur, en proie à des comportements inappropriés, la harcelait régulièrement, allant jusqu’à des gestes physiques déplacés. Malgré ses refus et la confrontation, Nabila souffrait en silence. Heureusement, le destin a pris le relais sous la forme d’un accident grave qui a éloigné son harceleur. Depuis, elle a retrouvé la paix, espérant que cet individu ne refera pas surface.
Le récit de Nabila met en lumière le harcèlement sexuel et moral subi par de nombreuses femmes en Algérie, qui choisissent souvent de souffrir en silence. Le silence, cependant, ne devrait pas être le prix à payer pour un mal venu d’ailleurs.
L’avis du spécialiste, le Dr A. Nazim, psychologue, souligne l’importance de refuser le harcèlement et de se défendre, indiquant que les lois et l’opinion publique évoluent en faveur des victimes. Il encourage les femmes à ne pas accepter le harcèlement, affirmant que le travail devrait être une source d’épanouissement, préservée grâce à la volonté de refuser de subir le mal.
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