Chacun s’affaire en cuisine, préparant avec soin les meilleurs plats pour célébrer l’arrivée du vendredi, cette journée sacrée et chère au cœur des musulmans. Mais le vendredi, on ne cuisine pas que pour sa famille : on pense aussi aux voisins. On met de côté une assiette, une seule, mais pleine de sens. Une assiette qui, chaque semaine, a un goût bien à elle : le goût de la tendresse.
Une tradition qui rapproche les cœurs
Cette tradition continue de rapprocher les cœurs : l’échange de plats entre voisins. Ce geste simple, mais profondément humain, dépasse le partage d’un repas. Il incarne l’amour discret, la solidarité sincère et les liens affectueux qui unissent les foyers d’un même quartier.

Les plats passent de main en main, porteurs d’arômes réconfortants et de souvenirs chaleureux. Chez Asmaa, la table du déjeuner du vendredi est toujours garnie de mets variés: rechta, couscous, chakhchoukha ou autre. Fidèle à une habitude qu’elle a héritée de sa famille et qu’elle perpétue depuis des années, elle prépare chaque semaine un petit plat à offrir à chacune de ses quatre voisines. Peu importe le contenu : ce qui compte, c’est l’intention, l’attention portée à l’autre, le geste chargé de respect et d’amitié.
Et cette coutume ne s’arrête pas à un immeuble. Oum Ahmad, dans un autre coin du quartier, échange elle aussi des plats avec ses voisines le vendredi. Cette tradition représente le goût de la fraternité, de la générosité, du partage sans attente. Pour elle, le vendredi est l’occasion parfaite pour exprimer ces valeurs, dans une atmosphère paisible, bienveillante, où règne l’esprit de la communauté.
Comme elle le dit si justement : « La saveur des plats des voisins est différente ». Et elle a raison. Car ces plats-là sont mijotés avec amour, partagés avec le cœur, et assaisonnés de cette magie toute particulière qui fait du simple fait de donner… un acte de communion.
Une habitude qui se transmet de génération en génération
Ce geste, simple en apparence, prend en réalité une portée bien plus grande. L’échange de plats est l’un des comportements nobles qui perdurent dans de nombreuses familles, notamment chaque vendredi. Une habitude profondément ancrée dans la culture, qu’on retrouve entre voisins, mais aussi entre proches et amis. Elle naît du respect, de l’estime, et du désir de rappeler que les voisins ne vivent pas les uns à côté des autres par hasard, mais qu’ils font partie d’un même tissu social, unis par la chaleur du lien humain.

Offrir une assiette, c’est dire : « Je pense à toi, tu fais partie de ma maison, de ma fête, de mon vendredi. »
Et cette pratique ne connaît ni classe sociale ni génération : elle est universelle. Beaucoup la perpétuent avec cœur, quelles que soient leurs ressources. Car le vendredi, jour de rassemblement, appelle naturellement à ce type d’élan. La variété des plats échangés vient aussi éveiller les sens, égayer les tables, et renforcer ce sentiment de communauté.
Cette coutume ne relève pas seulement du partage alimentaire. Elle s’inscrit dans un cadre plus large, celui de l’éducation sociale, de la transmission des valeurs et des gestes qui nourrissent les liens durables entre voisins et proches. Généraliser cette tradition, c’est renforcer l’esprit de solidarité et de fraternité dans nos quartiers.
Alors, que cette assiette du vendredi ne soit pas qu’un simple contenant de nourriture, mais un véritable pont d’affection tendu vers l’autre. Qu’elle voyage de main en main, de cœur à cœur, portant avec elle un peu de notre attention, de notre chaleur humaine, de notre envie de vivre ensemble autrement.
À ceux qui ont laissé cette tradition s’éteindre dans le tourbillon du quotidien, qu’ils la fassent revivre, même timidement. Il suffit d’un petit plat, d’un geste sincère, pour raviver ce lien si précieux. Car il y a une joie discrète mais profonde à offrir… et un sentiment de plénitude incomparable à voir le visage d’un voisin s’illuminer à la porte.
Et si, chaque vendredi, on renouait avec cette habitude, simplement, généreusement ? Il n’en faudrait pas plus pour faire du vendredi un vrai jour de fête… pour tous.
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